Marc Riboud - L'oeil du voyageur

La Villa Tamaris à La Seyne-sur-Mer nous propose de mettre nos pas dans ceux de Marc Riboud, photographe légendaire, entré chez Magnum sur l'invitation de Robert Capa et Henri Cartier-Bresson, excusez du peu. Comme il y a des écrivains voyageurs, Riboud fut un photographe voyageur. L'expo grandiose, prêtée par le Musée Guimet, nous emmène, des années 50 aux années 2000, à Paris, en Angleterre, en Asie, Chine, Japon, Vietnam, Inde, Pakistan, Ghana, bref partout où Riboud a pris le temps de nous apprendre "à regarder les autres sans trop s'approcher, pour mieux les voir... à préférer le faible au fort, la justice à la contrainte".

(Guy Robert)

 


Sadie Von Paris - ANTHRACITE

Anthracite, c’est noir, ou plutôt gris foncé, sombre comme les vagues et les rochers quand l’ombre gagne ou que la mer est souillée de pollutions. Anthracite ça vient des profondeurs de l’âme, du corps, parce que l’amour n’est plus, fait place au vide et que remontent le rejet, les glaires, les pleurs, acides, mais pourtant salutaires d’être, à nouveau, vivant.e…

Des mots, des images, une narration puissante qui embarque dans un monde de sensations, d’attraction et de répulsion, de corps et de roches, de gris et de couleurs, de lumière et d’ombres.

Une manière forte de conclure une saison d’expos chez Rétine. Et puisque c’est la dernière de la saison, heureusement visible, en prolongations, jusqu’à la fin juin.

(Jean-Benoît Zimmermann)

Rétine Argentique - 85 rue d'Italie 13006 Marseille, jusquà fin juin

 


Brigitte Manoukian - Le lexique de la couturière

Rappelez-vous la travailleuse de votre grand-mère et tout ce qu'elle contenait de fils, d'aiguilles, de boutons, de souvenirs... Près de ces objets, pris en gros plan et ainsi magnifiés par la photographe, on découvre une dentelle, une broderie, une reprise et c'est nos souvenirs qu'elle réveille. Pas de légendes mais un lexique au vocabulaire chargé de double et triple sens.
Pour l'artiste, c'est dans une malle que s'est faite la transmission sur plusieurs territoires et sur quatre générations. Une malle que "j'ai vidé de tout ce qu'elle contenait, nous dit-elle, (...) douleurs, labeurs, peines, sortilèges, exils, pleurs... pour être remplie de ce que je décide. Voilà qui est fait".
L'art comme transformation, ou comment alléger la passation sans trahir la mémoire.
 
(Aline Memmi)
 
 
Jusqu'au 7 juin 2025

 


Jean-Pierre Sudre et Cesare Di Liborio

Chambre noire pour rêve clair

 

Deux photographes de styles et de générations différentes, l’un étant né à Paris en 1921, l’autre à Reggio Emilia en 1960. Pourtant même s’ils ne se sont probablement jamais rencontrés, Cesare Di Liborio, grand admirateur de Jean-Pierre Sudre, s’est lancé sur les traces de son aîné dans l’utilisation en photographie des techniques du mordançage*. Mais tandis que l’un crée des paysages fantasmagoriques, l’autre transforme et étire des portraits d’une grande douceur. En assemblant et accrochant en alternance une série d’oeuvres de chacun, Florence Verrier, directrice de la galerie Parallax a su provoquer ainsi un dialogue esthétiquement étonnant entre les deux corpus d’images. Et ça fonctionne incroyablement bien !

(JBZ)

 

Jean-Pierre Sudre - Paysage matériaugraphique

Cesare Di Liborio 

Galerie Parallax – 3 rue des Epinaux, Aix-en-Provence
Du 9 Mai au 21 Juin 202

* http://www.stage-photo-artisanale.com/page-d-exemple/le-mordancage/

 


Dans le flou - Une autre vision de l'art, de 1945 à nos jours

Le flou, comme mode d’expression artistique, est ancré de longue date dans l’histoire de la peinture, que ce soit dans l’oeuvre de Turner, dans celles des Impressionnistes ou dans la photographie naissante. Mais c’est surtout dans l’après deuxième guerre mondiale qu’elle devient une esthétique particulière de la peinture et surtout de la photographie, qui brouille la réalité pour mettre en avant l’incertain, l’indistinct ou l’imprévisible, ou encore quand il s’agit de parler de l’indicible (camps d’extermination, génocide des Tutsis…). Une exposition riche et passionnante sur une thématique jamais traitée aussi pleinement.

(JBZ)

 

Alfredo Jaar, "Six Seconds", 2001
Cette jeune fille en bleu a été témoin du massacre de son père et de sa mère à coups de machette. Alfredo Jaar avait pris rendez-vous avec elle, mais au moment de répondre à ses questions, l'adolescente, incapable de prononcer un mot, est repartie en lui tournant le dos. Dans un mouvement réflexe, il a alors saisi son appareil et pris ce cliché sans le cadrer, sans faire le point.

Musée de l’Orangerie, Jardin des Tuileries, Paris
Du 30 Avril au 18 Août 2025

 

Pavel Jasansky

Superbe découverte du travail de l'artiste Pavel Jasansky. Designer, plasticien, sculpteur, vidéaste et photographe, Jasansky utilise tous les supports. Ses photographies noir et blanc, prises à Paris dans les années soixante et soixante-dix, sont joyeuses et décalées. Ses portraits, amis et célébrités, qui défilent dans une vidéo, très proches, souvent en contre-plongée, sont tous intéressants.  J'ai particulièrement aimé ces groupes de femmes et d'hommes filmés nus en mouvement, puis photographiés ; avant que la photographie en très gros format ne soit lacérée de peinture noire. Le résultat est à la fois saisissant et très beau.

(AM)

Maison de la photographie, Prague, République Tchèque
Jusqu'au 31 Août 2025


Jan Saudek

Magnifique exposition rétrospective de cet immense photographe tchèque qui, souvent du fin fond de sa cave, a créé et colorisé des images à nulle autre pareilles. Des corps amis, amants, enfants, nus ou parés, crudité et poésie, mort et tendresse. Un artiste controversé, à l’œuvre torturée mais tellement fascinante.

Dans la même galerie, à d'autres étages, des œuvres d'autres icônes artistiques du XXème siècle, Andy Wharol et Salvador Dali, envers lesquels l’enfant terrible de la photographie tchèque se situe sans aucun doute sur un pied d'égalité.

(Aline Memmi et Jean-Benoît Zimmermann)

Central Gallery, Prague, République Tchèque, jusqu'au 12 février 2026


Fünf Freunde (cinq amis)

Ce clin d’œil au "Club des cinq", c'est l'histoire de cinq grands artistes (John Cage, Merce Cunningham, Jasper Johns, Raul Rauschenberg et Cy Twombly), amis dans la vie et dont les créations se sont influencées, répondues, croisées. Une découverte passionnante qui révèle la puissance d'interaction entre photographie (Rauschenberg), peinture, musique, danse... et de relire et relier ainsi leurs œuvres.

(JBZ)

Museum Brandhorst, Münich, Allemagne, jusqu'au 17 Août 2025

 


Cyril Becquart - La vallée

Des photos d'arbres, de végétation, sombres, contrastées, vivantes. Des grandes photos dans des cadres en bois clair, sans marge blanche, d'une modernité incroyable, et qui contrastent avec des photos plus petites, bleutées ou sépia, qui nous évoquent un passé lointain. Quelle surprise de découvrir en interrogeant le photographe (ce n'est pas écrit dans les textes de présentation de l'expo) que toutes les photos, les grandes comme les petites, ont été prises à la chambre noire, l'antique appareil de la fin du 19ème siècle !

(Théo Zimmermann)

Rétine Argentique - 85 rue d'Italie 13006 Marseille

 


Gaël Turine, Les ravages de la tranq

Depuis la crise des opioïdes initiée fin des années 1990 par un labo américain qui sous couvert d'apaiser les douleurs fit avec l'oxycodone un business monstrueux, c'est le fentanyl, une drogue de synthèse peu coûteuse à produire qui inonde maintenant certains quartiers, comme à Kensington (Philadelphie), produit lui-même coupé avec de la xylazine (utilisé par les vétérinaires pour endormir de gros animaux). Le mélange obtenu, dénommé "tranq", décuple les effets des opioïdes avec des conséquences terrifiantes.

Photographier ces gens dans une vulnérabilité absolue, alors que les dealers veillent, n'est pas une mince affaire. Par la qualité et la force de ses photos, en montrant la souffrance crue mais sans jamais rabaisser les individus, en expliquant chaque situation par des légendes précises, le photographe documentaire Gaël Turine, nous livre un témoignage essentiel car il faut que le monde voie et sache.

(Aline Memmi)

Les blessures aux mains de ce toxicomane s’aggravent à chaque prise de tranq. Si la toxicité et la dangerosité de ce mélange pour le corps humain sont scientifiquement prouvées, cela n’a pas freiné les producteurs et trafiquants pour créer ce cocktail destructeur et bon marché
© Gaël Turine

 

Galerie Fait & Cause - 58 rue quincampoix, 75004 Paris
du 20 février au 12 avril 2025


American Street Photography 1950s - 1970s

La Galerie Rouge rassemble de grands noms de la street photography américaine en noir et blanc. Un parcours exceptionnel où l'on trouve de grands maîtres comme Joseph Sterling, Garry Winograd ou Louis Faurer, mais où l'on découvre aussi l'excellent travail de Danny Lyon, moins connu de ce côté-ci de l'Atlantique. Ses images magnifiquement construites révèlent une forte proximité avec ses sujets d'où ressort une empathie qui n'est pas feinte. Un grand de la photo humaniste qui mériterait d'être mieux connu ! A quand un Photopoche sur Danny Lyon ???

(Jean-Benoît Zimmermann)

 

Danny Lyon, Six Wings Cellular Block, Ramsey Prison Felons, Texas, 1968

Galerie Rouge, 3 rue du Pont Louis-Philippe, 75004 Paris
Du 23 janvier au 15 mars 2025


Mathilde Eudes - non obscura

Au départ il y a un secret et une séparation. Une petite fille unique et un perroquet pour compagnon. Lorsque le décès du jumeau est révélé, c'est toute une histoire qui peut se recoller. Et qui aboutit aujourd'hui par un travail minutieux de réparation : photographies polies et finement éclairées à la feuille d'or, textiles manuscrits, dessins, objets,  jusqu'aux plumes du perroquet qui habillent une robe de baptême. C'est émouvant mais pas triste, juste éblouissant ! Mathilde Eudes dit qu'elle n'a plus peur de la mort à présent. C'est sa première expo, artiste et artisane, quel talent !

(Aline Memmi)